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Les monades de l'Abbé
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Les monades de l'Abbé
30 mars 2009

Le conte de Bielefeld (1ere partie)

0805_smoke_ghostDeux raviolis survivants, se battent pour l'hégémonie dans son assiette. Ils dansent un ballet animé par les mouvements rêveurs de sa fourchette dans la sauce amatriciana...

Anya rêve... Arbitre suprême de cette haute lutte rageuse entre deux bouts de viande farouches, engoncés dans leurs armures de pâtes flasques. Une lutte qu'elle ignore totalement d'ailleurs, car Anya rêve à d'autres paysages, d'autres lieux et surtout à quelqu'un d'autre. Elle est assise, seule, à une table de ce petit resto italien dans la banlieue d'une petite ville allemande, car Anya s'est une fois de plus jetée sur les routes, pèlerine du Saint-Commerce pour répandre la parole sacrée du joint hypertore et du raccord haute-précision. Il y a quelque chose de très étrange, d'un peu triste mais d'infiniment rassurant en même temps à concevoir qu'un être comme Anya puisse travailler pour l'industrie et faire ce genre de travail. C'est du moins ce que lui a dit le jeune homme à qui elle est en train de penser juste maintenant, alors qu'un ravioli s'apprête à exécuter "propre et net" son rival d'assiette. A cette pensée, Anya sert sa fourchette de colère, a tel point qu'elle dérape dans son plat créant un mini vortex, perturbant sans s'en apercevoir la lutte primordial de nos deux gladiateurs en sauce. Comment s'appelait-il ce petit con rencontré à Douai? Kevin c'est ça?... Kevin, oui, et elle le sait très bien d'ailleurs, pas la peine de s'inventer une fausse distance, un feint mépris, elle ne peut pas se tromper elle-même... Il l'a touché, il l'a blessé...

Kevin, pauvre petit Kevin, avec ses certitudes, ses vues et ses théories sur la vie qui après quelques verres, bien en confiance toute virile de jeune mâle, pas sûr de son charisme ni de son pouvoir de séduction mais tellement sûr de son intellect, faux modeste, vaniteux sans envergure, s'est fait prendre aux vapeurs de l'alcool et s'est convaincu tout seul de l'avoir séduite, de l'avoir tellement séduite... Alors tout a basculé, il s'est mis à pérorer ce con...

Quelle grande théorie !!

Rewind :

Ils sont attablé tous les deux dans la petite brasserie à la porte de laquelle nous avions laissé Anya

" Tu sais qu'en fait je n'ai pas arrêté de te regarder toute l'après-midi, et je savais pas comment t'aborder...

- tu fais un flatteur déplorable mon cher Kevin, répartit Anya quand même un poil touchée par l'aveu

- ben euh... en fait si si ! c'est pas de conneries !

- Et quelle éloquence mon cher !"

Il est venu la retrouver, trempé de pluie, son pull informe d'étudiant attardé est encore tout fumant d'humidité dans l'atmosphère surchauffée de la brasserie.

" Bon ok pour l'éloquence... Je peux te faire découvrir nos bières locales pour me faire pardonner

- Je préférerais du vin... répond Anya, adoucissant son refus par un charmant sourire."

Et c'est à partir de ce moment que tout commence à s'écrouler progressivement, avec une lenteur insupportable. Le pauvre Kevin ayant un peu trop abuser des spécialités locales... Devisant puis pérorant sur de plus en plus de choses, de plus en plus de sujets, et malheureusement, de moins en moins élégamment.

Après deux heures de discussions confuses, Kevin entame ce qui sonnera le glas de la soirée :

" Tu sais en fait je trouve terrifiant et en même temps rassurant que tu bosses pour un truc aussi prosaïque que des machins hydrauliques. C'est vrai ! Sans dec ! t'as un physique et un charme de princesse de conte de fée, et en même temps, tu vois, c'est super de te voir bosser là-dedans parce qu'en fait ça te remet au niveau des autres, tu vois? Genre, y'a quelque chose de rassurant, pour monsieur tout le monde, genre moi, enfin pas tout à fait moi, à voir que les princesses aussi sont obligées de s'ancrer dans la réalité...

- pardon Kevin, mais, si je te comprends bien, tu veux dire que je justifie en quelque sorte ta médiocrité, que je te rassure, "genre"...

- ben ouais, c'est un peu ça..."

Anya sent une colère froide monter lentement en elle.

"Dis-moi Kevin, pour qui tu me prends au juste?

- ben pour une super jolie fille que j'aimerais mieux connaître, repartit Kevin le regard louchant et l'équilibre de plus en plus précaire.

- en fait je suis une jolie "princesse" dont tu méprises le boulot, et par là même les choix qu'elle peut faire, mais qui serait idéal pour t'éclater un petit moment, c'est ça? demande Anya en se penchant doucement vers Kevin, un sourire angélique aux lèvres.

- ouais !! en gros c'est un peu ça !! répond le jeune homme, ricanant et maintenant totalement désinhibé. Le prend pas mal mais t'aurais pas pu faire un autre boulot? Chais pas moi dans un truc plus glamour? Parce que la princesse au boulon, pardon mais ça fait un peu spé !"

Kevin rit très fort de sa plaisanterie, part involontairement en arrière, bouscule la personne se trouvant à sa gauche, et se rattrape péniblement au comptoir.

" Euhh... pardon, j'ai un peu bu ! mais elles sont bonnes nos bières non?"

Anya écourte le sursis accordé à ses raviolis, les empale tous les deux sur sa fourchette et les portent à sa bouche, mettant ainsi fin à la lutte d'assiette minuscule et fratricide de ces dernière minutes. Elle se tamponne les lèvres de sa serviette et lève une main pour appeler un serveur. Anya n'a pas envie de rentrer, elle veut reboire un verre de vin. Elle a le temps, et de toute façon, l'histoire de Douai ne passe toujours pas. Ce fameux soir, elle l'a planté dans le bar. Il a essayé de la rattraper en titubant, mais s'est effondré à mi-parcours sur un trottoir pour vomir. Anya est rentrée à son hôtel écœurée, se laver et se coucher pour dormir d'un sommeil sans rêves, et fuir au plus vite Douai à qui elle ne redonnerait plus de seconde chance.

Le serveur lui apporte le verre de vin demandé. Tchatcheur reconnaissable à 2km, il lui fait un brin la cour avant de lui amené un verre de liqueur digestive "pour la plus belle des clientes de la soirée". Anya le remercie d'un faible sourire. Elle n'a pas la forme pour se faire draguer ce soir, même si l'homme, archétype du séducteur rital, à l'air plus sympathique et moins matamore qu'il ne veut le laisser paraître.

Le rêve la reprend… gentiment, doucement, s’approche caresse de plume. Il est si facile de se dissoudre dans les rires ambiants. Une petite fille, deux ou trois tables plus loin, presque encore un bébé se tient toute fiérote debout sur sa chaise, les mains fermement agrippées au dossier et dévisage Anya comme seuls savent le faire les tous petits enfants.  Anya lui sourit tendrement. La petiote, timide, la dévisage avec sérieux et solennité, avant de fleurir d’un immense sourire à trois quenottes minuscules, se cache derrière le dossier, ose un petit œil rieur pour surveiller l’ennemi, se replanque derrière le bois de sa chaise, puis se dresse sur ses petites jambes, l’œil plein de défi dardé sur Anya… Un « bouh » de cette dernière et la petite musaraigne se carapate derrière son bouclier-dossier,  en riant d’une terreur ravie ! Le jeu continue comme ça quelques minutes jusqu’à ce que la petite fille détourne le regard sur la gauche, l’attention retenue par autre chose, sans doute un éclat de lumière sur les dorures kitsch du resto, ou peut-être par un bruit incongru… Anya repart dans ses songes, laissant son regard flotter droit devant elle.

Au bout de quelques minutes, elle réalise de façon quasi inconsciente que le petit bout de chou, toujours dans son champ de vision, n’a pas bougé et continue de fixer un point sur sa gauche. Elle porte alors son regard dans la direction pointé par le regard de la petite... Elle le voit, elle le voit très bien mais a du mal à y croire. Il la regarde fixement avec un demi-sourire malicieux. Il est debout immobile, au milieu du restaurant. Les serveurs l'évitent comme s'ils semblaient ne pas le voir. Il est tout de noir vêtu, pantalon de toile, col roulé, et docs aux pieds, ces docs qu'elle abore...

Le petit Breton !

Il ne peut pas être ici ! Anya l'a eu au téléphone il y a à peine une heure, et il était en France...

 

 

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Commentaires
C
alors? to be continued or not to be continued?
L
Si Oneiros avait cherché Janus ,<br /> il l 'aurait terrassé !<br /> et les rêves qui permettent parfois de comprendre L'essence<br /> des choses sont toujours porteurs d'espoir.<br /> Au fait Architas a t il toujours raison ?<br /> Et qu'en pense Philoas ?
R
Aïe je ne bite rien à l'allemand...<br /> J'ai des nouvelles mais elles sont oniriques, petit conte oblige...<br /> Comment va à Roissy?
L
Heureux Breton !<br /> Apparamment Anya préfère le vin.<br /> Je l'ai revu en rêve.Elle était à la foire de<br /> H.en Germany,Hall02 Stand B12,et discutait en<br /> allemand ...Die norm ISO 9001 gehört zu der reihe<br /> der normen ISO 9000... j'ai rien compris.<br /> Parlait elle de bière,de vin,de mec,de souris,<br /> de Laekenois ?<br /> peut-être Rom a-t-il des nouvelles?<br /> excuse moi d'être un peu Mêle-tout , mais je ne<br /> peux m'empêcher de faire mon Janus
R
Quelle culture de la bière ! suis impressionné !<br /> <br /> Ce que je consomme? De la Coreff bien sûr !! mais blonde pas ambrée, à la rigueur brune...<br /> <br /> On peut regretter Morlaix, ceci dit le patron qui est un copain, nous héberge et nous abreuve gratos mes amis et moi à Carhaix pour les vieilles charrues chaque année... Donc pas de quoi se plaindre...
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